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Choses à Savoir HISTOIRE
Quelle femme fut jugée pour des relations sexuelles "surnaturelles" ?
L’“affaire Svensdotter” reste l’un des épisodes les plus étranges et révélateurs de la superstition judiciaire européenne. Elle se déroule en 1656, dans la Suède du XVIIᵉ siècle, un royaume profondément luthérien, encore marqué par la peur du diable et les procès de sorcellerie. Au centre de l’affaire : une femme nommée Märet Jonsdotter Svensdotter, accusée d’avoir entretenu des relations sexuelles avec un être surnaturel.
Le contexte : la Suède et la chasse aux sorcières
À cette époque, la Suède vit une période de grande tension religieuse. Les autorités ecclésiastiques et civiles mènent une lutte acharnée contre tout ce qui est perçu comme hérésie ou pacte avec le Malin. Les paysans croient encore aux trolls, aux esprits de la forêt et aux sabbats de sorcières. Le moindre comportement jugé “anormal” — surtout venant d’une femme — peut devenir suspect.
C’est dans ce climat que Märet Svensdotter, une jeune domestique vivant près de Lillhärdal, dans le nord du pays, est dénoncée. Selon ses voisins, elle se serait vantée d’avoir rencontré un “esprit masculin”, parfois décrit comme un démon ou un être féerique, avec lequel elle aurait entretenu une relation charnelle.
Le procès pour relations “surnaturelles”
L’affaire remonte jusqu’aux autorités locales, puis au tribunal ecclésiastique. Interrogée à plusieurs reprises, Svensdotter décrit — sous la pression — un “homme noir” qui viendrait la visiter la nuit et avec lequel elle aurait eu “plaisir et effroi”. Les juges interprètent cela comme un pacte avec le diable, preuve d’une sorcellerie manifeste.
À cette époque, les “relations sexuelles avec des démons” (incubes et succubes) sont un motif fréquent de condamnation. Les théologiens affirment que le diable peut prendre forme humaine pour séduire les femmes et les corrompre.
Sous la torture et la peur, Märet avoue partiellement, avant de se rétracter. Mais ses déclarations suffisent. En 1656, elle est condamnée à mort pour commerce charnel avec un être surnaturel et sorcellerie. Elle sera exécutée — probablement brûlée vive, comme c’était l’usage.
Une affaire emblématique
L’affaire Svensdotter marque le début de la grande chasse aux sorcières suédoise, qui fera plusieurs centaines de victimes dans les décennies suivantes. Elle illustre à quel point la frontière entre superstition, religion et justice était poreuse.
Aujourd’hui, elle symbolise les excès d’une époque où la peur du surnaturel justifiait l’injustice, et où une femme pouvait être condamnée simplement pour avoir dérangé l’ordre moral de son temps.
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Pourquoi l'histoire du président américain James Garfield est-elle fascinante ?
02:59|James Garfield est sans doute l’un des présidents les plus étonnants et les moins connus de l’histoire américaine. Son parcours ressemble à une ascension miraculeuse : né en 1831 dans une cabane en rondins dans l’Ohio, orphelin de père à deux ans, il commence sa vie comme garçon de ferme et conducteur de bateau sur un canal. Rien — absolument rien — ne le prédestinait à la Maison-Blanche.Garfield possède pourtant un don rare : une intelligence fulgurante. Il apprend le latin en quelques semaines, le grec ancien en quelques mois, au point de pouvoir écrire simultanément un texte en grec d’une main et en latin de l’autre. Brillant orateur, autodidacte infatigable, il devient professeur, puis président d’université avant même ses 30 ans.Quand éclate la guerre de Sécession, Garfield s’engage comme simple officier mais gravit les échelons grâce à son sens tactique et son sang-froid. À 31 ans, il est déjà général. Après la guerre, il entame une carrière politique impressionnante : élu au Congrès pendant 17 ans, il devient l’une des figures intellectuelles majeures du Parti républicain.Mais son accession à la présidence en 1880 tient presque du hasard. Garfield ne voulait même pas être candidat ; il venait pour soutenir un autre prétendant. Pourtant, lors de la convention républicaine, après 36 tours de scrutin chaotiques, les délégués se tournent soudain vers lui comme compromis providentiel. Il devient président malgré lui.Et c’est tragiquement là que commence la seconde partie de son histoire — celle qui a marqué la médecine moderne. Le 2 juillet 1881, seulement quatre mois après son investiture, Garfield est victime d’un attentat : un déséquilibré, Charles Guiteau, lui tire dessus dans une gare de Washington. La balle n’est pas immédiatement mortelle… mais les médecins, en sondant la plaie avec des doigts non désinfectés, provoquent une infection massive. Alexander Graham Bell lui-même tente de localiser la balle avec un détecteur métallique expérimental — un des tout premiers de l’histoire — mais l’échec tient à un détail tragique : le lit du président est en métal.Garfield agonise pendant 79 jours, dans ce qui deviendra l’un des premiers grands cas médicaux médiatisés du pays. Sa mort, en septembre 1881, bouleverse les États-Unis et accélère des réformes cruciales, notamment l’assainissement des pratiques médicales et la lutte contre le système des nominations politiques corrompues.Ainsi, Garfield reste l’un des présidents les plus brillants… et l’un des plus tragiques. Un génie autodidacte, un héros de guerre, un président par accident, et une victime de la médecine d’avant l’hygiène moderne.
Pourquoi Catherine de Médicis a-t-elle été accusée du massacre de la Saint-Barthélemy ?
02:59|Le massacre de la Saint-Barthélemy, dans la nuit du 23 au 24 août 1572, demeure l’un des épisodes les plus violents et controversés de l’histoire de France. Et depuis plus de quatre siècles, un nom revient sans cesse : Catherine de Médicis. Pourquoi l’a-t-on accusée d’être la grande instigatrice du massacre ? La réponse tient autant à la politique qu’aux préjugés qui entouraient cette reine italienne devenue régente.D’abord, le contexte. Depuis dix ans, la France est déchirée par les guerres de Religion entre catholiques et protestants (huguenots). Catherine tente de gouverner au-dessus des factions, cherchant des compromis : elle organise le mariage de sa fille Marguerite avec le chef protestant Henri de Navarre, espérant réconcilier les deux camps. Mais ce geste, audacieux, attise les colères. Les catholiques radicaux la voient comme trop conciliante ; les protestants se méfient de son entourage catholique, notamment du duc de Guise.Tout bascule le 22 août 1572, quand l’amiral de Coligny, chef respecté du parti huguenot et conseiller influent du jeune roi Charles IX, est blessé par un tir d’arquebuse. Les protestants accusent les Guise ; d’autres murmurent que Catherine, inquiète de l’influence croissante de Coligny sur son fils, aurait commandité l’attentat. Aucun élément ne le prouve, mais la rumeur se répand.C’est ici que naît l’accusation centrale : Catherine aurait, prise de peur, convaincu Charles IX de frapper les chefs protestants avant qu’ils ne se vengent de l’attentat. Selon ce récit, elle aurait manipulé un roi faible et impulsif, paniqué à l’idée d’un complot huguenot. Le Conseil royal prend alors une décision terrible : éliminer quelques chefs protestants pour éviter une guerre immédiate. Mais la situation échappe totalement au contrôle. L’assassinat ciblé se transforme en massacre généralisé, encouragé par la ferveur catholique de Paris et l’explosion de violences spontanées.Après coup, il est commode de faire de Catherine la grande coupable. Elle est italienne, étrangère, femme de pouvoir dans un univers masculin : idéale pour concentrer les fantasmes politiques. Les chroniqueurs protestants renforcent cette image d’une « reine empoisonneuse », héritée des clichés anti-médicis. Pourtant, les historiens s’accordent : Catherine a validé une décision catastrophique mais n’a pas voulu ni anticipé un bain de sang national. Elle cherchait à éviter une guerre civile, et a, au contraire, déclenché l’un des pires massacres du siècle.En somme, Catherine fut accusée autant pour son rôle politique central que pour l’image diabolique qu’on bâtit autour d’elle. Une figure complexe, piégée par un royaume en flammes.
Comment Jacques Coeur a-t-il fait fortune ?
02:52|L’histoire de Jacques Cœur ressemble à une épopée marchande. Né à Bourges autour de 1400 dans une famille modeste de pelletiers, rien ne prédestinait cet enfant du Berry à devenir l’un des hommes les plus puissants de France. Et pourtant, en quelques décennies, il bâtit une fortune colossale, au point d’être surnommé le “grand argentier” du royaume.Très tôt, Jacques Cœur comprend que le salut économique ne se joue pas dans les campagnes françaises ravagées par la guerre de Cent Ans, mais sur les routes du grand commerce international. Il s’initie d’abord aux affaires familiales, mais son ambition dépasse vite le marché local. Vers 1430, il se lance dans le négoce méditerranéen, le secteur le plus lucratif du XVe siècle. Là où la France reste prudente, lui décide d’oser : il veut commercer directement avec l’Orient, sans intermédiaires italiens.Il met en place une stratégie visionnaire. D’abord, il crée sa propre flotte et établit une série de comptoirs commerciaux tout autour de la Méditerranée – en Italie, en Sicile, à Rhodes, en Syrie, jusqu’en Égypte. Ensuite, il diversifie les échanges : il exporte des draps français, importe des épices, des soieries, des pierres précieuses, du cuivre, des parfums et des tapis d’Orient. Il invente presque un commerce triangulaire avant l’heure, réinvestissant immédiatement ses gains dans de nouvelles cargaisons pour faire tourner son capital sans arrêt.Ce réseau gigantesque fait de Jacques Cœur l’homme incontournable de la finance française. Sa richesse, sa discipline, son sens du risque attirent l’attention du roi Charles VII. Le monarque, en pleine reconquête du royaume face aux Anglais, a besoin d’argent. Jacques Cœur devient son banquier, son conseiller et son fournisseur. Il finance les armées, avance des sommes colossales à la Couronne et participe même à la réforme monétaire. En échange, le roi lui accorde privilèges, monopoles et titres. Le marchand devient officier royal, anobli en 1448.Mais son ascension fulgurante suscite jalousies et accusations. En 1451, il tombe en disgrâce : on l’accuse – à tort – d’avoir empoisonné la favorite du roi, Agnès Sorel. S’y ajoutent des procès pour dettes ou malversations, souvent instrumentalisés par ses rivaux. Il est dépouillé, emprisonné, mais parvient à s’évader. Fidèle à lui-même, il reprend la mer et meurt en 1456 lors d’une expédition en Orient.Malgré sa chute, Jacques Cœur demeure l’une des figures les plus fascinantes de l’histoire économique française : l’homme qui, en partant de rien, a bâti un empire commercial mondial au XVe siècle.
Quel paysan devint Empereur ?
02:55|L’histoire chinoise compte des souverains nés dans les palais, fils d’empereurs et héritiers de lignées prestigieuses. Mais elle connaît aussi une exception spectaculaire : celle de Zhu Yuanzhang, futur empereur Hongwu, fondateur de la dynastie Ming, qui passa de paysan misérable à maître de la Chine en à peine quarante ans. Peu de destins, dans toute l’histoire mondiale, rivalisent avec une telle ascension.Zhu Yuanzhang naît en 1328 dans une famille extrêmement pauvre du sud de la Chine, sous la domination de la dynastie mongole Yuan. Les conditions sont rudes : les impôts sont écrasants, les récoltes mauvaises, et la corruption omniprésente. Enfant, il garde les troupeaux et travaille dans les champs. À 16 ans, un drame scelle son sort : la peste emporte ses parents et presque toute sa famille. Sans ressources, il se rend dans un monastère bouddhiste pour mendier et survivre. Mais même ce refuge disparaît : le monastère ferme faute de moyens.Errant, il rejoint alors une rébellion paysanne, les Turban rouges, mouvement qui s’inscrit dans la grande révolte nationale contre les Mongols. C’est là que son destin bascule. Zhu Yuanzhang se démarque immédiatement : discipliné, charismatique, stratège naturel. Il grimpe les échelons à une vitesse fulgurante, jusqu’à diriger sa propre armée. Il s’entoure de conseillers brillants, dont des lettrés confucéens qui voient en lui un chef capable de restaurer l’ordre chinois.Dans une Chine ravagée par le chaos, Zhu Yuanzhang devient un symbole : celui du paysan honnête, incorruptible, porteur d’un renouveau moral. Il prend une ville après l’autre, élimine progressivement ses rivaux et, en 1368, chasse définitivement les Mongols de Pékin. Cette année-là, il proclame la naissance de la dynastie Ming — “les Brillants” — et prend le nom de règne Hongwu, “Grande Martialité”.Empereur, il impose un style radicalement nouveau. Lui, l’ancien mendiant, se méfie des élites et de la corruption. Il rétablit une administration stricte, favorise l’agriculture, redistribue des terres, et punit sévèrement les abus des fonctionnaires. Son règne pose les fondations d’un État puissant, stable, et profondément chinois : la dynastie Ming deviendra l’une des plus prospères de l’histoire.Mais Hongwu reste marqué par la peur du chaos qu’il a connu. Parfois brutal, souvent autoritaire, il gouverne avec une main de fer. Malgré cela, son héritage demeure immense : il est l’incarnation parfaite du self-made man impérial, l’homme qui, parti de rien, a refait un empire.Un paysan devenu empereur : l’histoire de Hongwu ressemble moins à une chronique historique qu’à une épopée. Et pourtant, elle est vraie.
Pourquoi le dieu égyptien Osiris est-il représenté avec la peau verte ?
02:19|Cette couleur singulière n’a rien d’un hasard esthétique : elle condense à elle seule toute la signification religieuse, cosmique et politique du dieu. Pour les Égyptiens, le vert n’était pas seulement une couleur. C’était un symbole de régénération, d’équilibre cosmique et de victoire sur la mort. Et Osiris incarne précisément ces trois dimensions.D’abord, Osiris est le dieu de la végétation et de la fertilité. Les Égyptiens associaient directement sa chair à la terre noire et fertile déposée chaque année par la crue du Nil. Cette terre noire, appelée « kemet », permettait aux champs de renaître après l’inondation. Le vert des plantes était ainsi la signature visible du cycle de la vie. La peau verte d’Osiris matérialise donc cette fonction : il est celui qui fait pousser, renaître et fructifier le monde. Dans plusieurs temples, on moulait même des figurines d’Osiris en « terre végétale », mélange de limon et de graines, qui germaient littéralement. Voir ces statuettes verdir était la preuve du pouvoir régénérateur du dieu.Ensuite, la couleur verte renvoie à Osiris en tant que dieu de la résurrection et maître du royaume des morts. Selon le mythe, Osiris est assassiné par son frère Seth, puis reconstitué par Isis avant d’être ramené à la vie. Sa peau devient alors la marque de cette résurrection : il revient d’un état de putréfaction, mais il renaît sous la forme la plus vigoureuse et la plus fertile qui soit. Le vert signifie donc que la mort n’est pas une fin, mais un passage. Dans l’imaginaire égyptien, choisir Osiris comme juge des morts, assis sur son trône au visage verdoyant, rappelait à chacun que la mort pouvait s’accompagner d’une nouvelle naissance.Le vert est aussi la couleur de la stabilité et du bon ordre cosmique, ce que les Égyptiens appelaient la « Maât ». Osiris incarne la justice, l’équilibre et la légitimité royale. Sa teinte verdoyante est donc un message politique : le pharaon, assimilé à Osiris, doit garantir prospérité, harmonie et continuité dynastique. Lors de l’intronisation d’un roi, Osiris sert de modèle : comme lui, un bon souverain « fait pousser » le pays.Ainsi, si Osiris est vert, ce n’est pas pour marquer son étrangeté, mais pour rappeler qu’il est le dieu de la renaissance sous toutes ses formes : celle des plantes, des morts et du monde ordonné. Un dieu dont la couleur dit déjà sa fonction.
Pourquoi la mort de Voltaire est-elle controversée ?
02:44|À première vue, il meurt comme beaucoup d’hommes de son âge : à 83 ans, affaibli, dans son lit, à Paris, en mai 1778. Mais l’histoire est plus complexe. Sa mort est entourée de confusions, de récits contradictoires, d’enjeux religieux… et, plus récemment, d’une découverte scientifique qui rebat les cartes.D’abord, les circonstances immédiates. Voltaire revient à Paris après des années passées à Ferney. Il est accueilli comme une rockstar du siècle des Lumières : foule énorme au théâtre, visites incessantes, soirées mondaines… À tel point qu’il s’épuise. Il souffre de douleurs violentes, de troubles digestifs, de vomissements. Les médecins parlent alors de « faiblesse générale », de troubles pulmonaires, ou d’« obstruction des viscères ». On ne sait pas vraiment.À cela s’ajoute un élément politique et religieux : Voltaire est l’ennemi juré de l’intolérance religieuse. L’Église, qui l’a combattu toute sa vie, veut éviter le scandale d’une mort « impie ». Les récits divergent : selon certains prêtres, il aurait refusé les sacrements ; selon d’autres, il les aurait acceptés. Ces contradictions nourrissent immédiatement une légende noire. Pour certains, Voltaire meurt en blasphémateur ; pour d’autres, il garde son esprit critique jusqu’au bout. Cette bataille idéologique a longtemps pollué l’interprétation médicale.Ensuite, il y a un mystère anatomique. Son cœur a été prélevé, comme il était d’usage pour les grands hommes, puis conservé. Et c’est là que la science moderne entre en scène. Des analyses très récentes, réalisées sur ce cœur embaumé et conservé à la Bibliothèque nationale de France, révèlent la présence d’une protéine spécifique associée à certains types de tumeurs. Les chercheurs concluent qu’il souffrait probablement d’un cancer – très vraisemblablement un cancer de la vésicule biliaire, souvent déclenché par des crises répétées de calculs biliaires. Or Voltaire avait justement une longue histoire de douleurs abdominales et de coliques hépatiques.Ces données reshappent totalement les hypothèses anciennes. Voltaire ne serait donc pas mort d’un « épuisement général », ni d’une pneumonie, ni d’un malaise cardiaque, comme on l’a longtemps écrit, mais d’un cancer avancé, ignoré des médecins du XVIIIᵉ siècle.Enfin, la controverse vient aussi du traitement de son corps. Refusé de sépulture chrétienne à Paris, on l’inhume en urgence à l’abbaye de Scellières, presque clandestinement. Des rumeurs circulent même sur l’enlèvement de sa dépouille. Tout cela a amplifié le mythe.En résumé : la mort de Voltaire est controversée parce qu’elle mêle politique, religion, incertitudes médicales… et aujourd’hui révélations scientifiques. Une mort à l’image de sa vie : disputée, débattue, passionnément commentée.
De quand date le premier bisou ?
02:43|Pendant longtemps, les chercheurs répondaient : il y a environ 4 500 ans, en Mésopotamie, dans les premières tablettes cunéiformes où l’on voit apparaître la description de baisers amoureux ou familiaux. Mais une étude toute récente, publiée en 2025 dans la revue Evolution and Human Behavior, vient totalement bouleverser cette chronologie. Selon cette analyse, le « premier bisou » remonterait non pas à l’humanité… mais à nos ancêtres primates, il y a entre 21,5 et 16,9 millions d’années.Les chercheurs ont d’abord redéfini ce qu’ils entendaient par « bisou » : un contact bouche-à-bouche non agressif, sans transfert de nourriture, utilisé dans un cadre social ou affectif. Sur cette base, ils ont comparé les comportements d’un grand nombre de primates actuels : chimpanzés, bonobos, gorilles, orangs-outans et d’autres espèces moins étudiées. Or beaucoup d’entre eux pratiquent un équivalent du baiser, parfois pour apaiser un conflit, parfois pour renforcer un lien, parfois dans un contexte reproductif.À partir de ces observations modernes, les scientifiques ont utilisé des modèles phylogénétiques – des outils permettant de reconstruire le comportement probable d’espèces anciennes – pour remonter dans le temps. Le résultat est frappant : l’ancêtre commun des hominidés et des grands singes, qui vivait il y a environ 20 millions d’années en Afrique, avait très probablement ce comportement de contact buccal affectif. Autrement dit, le baiser n’est pas une invention culturelle humaine, mais un héritage évolutionnaire très ancien.Cette conclusion change totalement notre vision. Jusqu’ici, on pensait que le baiser naissait dans les sociétés humaines sédentarisées, et qu’il s’agissait d’un rituel social complexe. Or il apparaît maintenant que les humains n’ont fait que reprendre un geste déjà présent chez leurs ancêtres. Comme le toilettage social chez les singes, le bisou aurait servi à réduire le stress, renforcer les alliances, apaiser les tensions et signaler la confiance. Dans certaines espèces, il joue aussi un rôle dans la sélection de partenaire : le contact buccal permettrait d’évaluer des signaux chimiques liés au système immunitaire ou à l’état de santé.L’étude reste prudente : certains primates sont peu documentés et la définition du « bisou » varie selon les espèces. Mais l’idée est solide et cohérente avec un grand nombre de données comportementales.En résumé : le premier bisou, loin d’être une invention récente de l’humanité, serait un comportement vieux de près de vingt millions d’années. Quand nous embrassons quelqu’un aujourd’hui, nous perpétuons un geste hérité de nos ancêtres primates — un geste bien plus ancien que l’amour romantique lui-même.
Pourquoi les nobles ont-ils porté des chaussures extra longues et pointues ?
02:29|Pourquoi, au Moyen Âge, certains nobles affichaient-ils des chaussures si longues et pointues qu’il fallait parfois les attacher au mollet avec une ficelle pour pouvoir marcher ? Ces chaussures ont un nom : les poulaines. Et elles racontent beaucoup plus qu’une simple mode extravagante.La polaine apparaît en Europe au XIIᵉ siècle, mais explose vraiment au XIVᵉ. C’est une chaussure dont l’avant se prolonge en une longue pointe, parfois de plusieurs dizaines de centimètres. Les chroniqueurs de l’époque en parlent avec amusement… ou indignation. Car ces chaussures ne sont pas là pour le confort : elles sont un symbole social.D’abord, la pointe longue signale que le porteur n’a pas besoin de travailler. Si vos journées sont faites de cheval, de guerre ou de labour, ce type de chaussure est totalement inutile, voire dangereux. En revanche, si vous êtes un noble qui ne marche qu’en intérieur, accompagné de serviteurs, la polaine devient un signe ostentatoire : elle dit au monde que vous appartenez à la classe oisive, celle qui peut se permettre d’être impratique. C’est, en un sens, l’équivalent médiéval d’un talon aiguille de vingt centimètres.Mais les poulaines deviennent aussi un terrain de compétition aristocratique. Plus la pointe est longue, plus elle indique le rang. Certaines sources évoquent des pointes de cinquante centimètres chez les nobles les plus fortunés. La mode devient tellement extrême que des villes, comme Paris ou Londres, tentent d’en limiter la longueur par des lois somptuaires. Elles craignent que cette extravagance ne brouille les distinctions sociales ou n’encourage une vanité jugée dangereuse.Il existe une autre dimension, plus symbolique : dans certaines iconographies, la chaussure pointue est associée au raffinement, à l’élégance, parfois même à une virilité sublimée. Pour les jeunes aristocrates, elle devient un marqueur séduisant, un signe de modernité et de bravoure.Cependant, cette mode attire critiques et satire. Certains religieux y voient une perversion morale, un signe d’orgueil ou même une « chaussure du diable » (à cause de la pointe, jugée trop agressive). Des sermons médiévaux dénoncent ces nobles qui peinent à s’agenouiller pour prier parce que leurs chaussures sont trop longues.Vers la fin du XVe siècle, la tendance disparaît, remplacée par les chaussures larges dites « à bec d’âne ». Mais les poulaines laissent une empreinte durable : elles montrent que la mode a toujours été un langage social puissant. Au Moyen Âge déjà, on affichait sa position non par les mots, mais… par la longueur de ses chaussures.
Comment un chien a sauvé les studios Warner ?
02:39|Dans les années 1920, Hollywood est encore un Far West artistique et économique. Les studios naissent, meurent, se restructurent, et la Warner Bros… vacille. À cette époque, les frères Warner – Harry, Albert, Sam et Jack – tentent désespérément de s’imposer dans un marché saturé. Leurs productions coûtent cher, rapportent peu, et l’entreprise file tout droit vers la faillite. Et pourtant, leur sauveur n’est ni un producteur visionnaire, ni une star glamour… mais un chien. Un berger allemand nommé Rintintin.Tout commence en 1918, dans les ruines d’un village français ravagé par la Première Guerre mondiale. Un soldat américain du nom de Lee Duncan découvre une femelle berger allemand et ses chiots abandonnés dans un chenil bombardé. Il sauve deux petits, les ramène aux États-Unis, et en dresse un : Rintintin. Très vite, Duncan réalise que le chien a un talent exceptionnel. Il est agile, obéissant, expressif. Et surtout, incroyablement photogénique.En 1922, Hollywood apprend son nom. Rintintin décroche un rôle dans The Man from Hell’s River, et c’est un triomphe. Le public, encore marqué par la guerre, se passionne pour ce chien héroïque, symbole de loyauté et de bravoure. Les producteurs de Warner Bros, eux, voient surtout une aubaine.La Warner, à l’époque, est au bord du gouffre. Elle n’a pas les moyens de rivaliser avec les géants comme Paramount ou MGM. Mais elle peut miser sur un phénomène. Rintintin devient donc la star du studio. Entre 1923 et 1930, il tourne près de trente films et remplit les salles à un niveau inattendu. On raconte qu’à certains moments, ses films rapportent jusqu’à la moitié des revenus annuels de la Warner. On le surnomme même « la saucisse à quatre pattes qui nourrit les frères Warner ».Ce succès permet au studio de survivre, puis d’investir dans ce qui deviendra son grand coup stratégique : le cinéma parlant. Sans l’argent généré par Rintintin, la Warner n’aurait probablement pas eu les moyens de produire The Jazz Singer en 1927, le premier film parlant à succès, celui qui transforme l’industrie et propulse le studio au premier rang d’Hollywood.Ainsi, l’histoire est simple mais incroyable : sans un chiot sauvé des décombres de la Grande Guerre, la Warner Bros n’aurait peut-être jamais existé telle que nous la connaissons. Rintintin n’est pas seulement un chien célèbre ; il est littéralement l’un des fondateurs involontaires du cinéma moderne.Un chien a sauvé la Warner… et, d’une certaine façon, l’histoire d’Hollywood tout entière.