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DeepTechs

La Deep Tech doit sortir des labos

Saison 3, Ep. 11

Dans cet épisode de DeepTech, Alexandre Bounouh, directeur général du CEA List et président du Réseau Carnot, revient sur le rôle central que joue la recherche publique dans la compétitivité industrielle française. Le CEA List, c’est 1 000 ingénieurs-chercheurs, un budget de 140 millions d’euros, dont seulement 20 millions de subventions publiques, avec un modèle économique fondé sur la contractualisation avec l’industrie. Son fonctionnement, partagé par les 39 instituts labellisés Carnot, s’inspire du modèle allemand des instituts Fraunhofer.

Ce réseau, qui regroupe 35 000 chercheurs, génère 600 millions d’euros de contrats annuels et a permis la création de plus de 1 800 start-up depuis 2006. Preuve, selon Alexandre Bounouh, que « l’investissement de l’État dans la recherche publique irrigue efficacement l’innovation privée ».

Il alerte toutefois sur le retard français : le financement R&D des entreprises stagne à 1,4 % du PIB, loin des 3 % de l’Allemagne. Pour lui, un changement culturel est nécessaire : « L’innovation ne doit plus être vue comme un centre de coût, mais comme un levier stratégique. » Il défend une recherche tournée vers les usages, tout en anticipant les ruptures à venir. IA post-deep learning, cloud distribué ou encore quantique : le CEA List investit à long terme. « On doit échouer parfois, mais on a le devoir d’essayer. » Un état d’esprit qui continue d’attirer les talents, motivés par le sens des projets et leur impact.

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  • 30. Small data is beautiful !

    33:30||Saison 3, Ep. 30
    Grégory Herbert est le CEO de Frisbii, une société qui accompagne les entreprises par abonnement dans la gestion de leurs revenus, de la facturation aux paiements en passant par la prévision financière. Arrivé il y a un an et demi à la tête de cette entreprise soutenue par le fonds américain PSG Equity, il pilote une plateforme récemment unifiée sous la marque Frisbii, présente en France, en Allemagne, au Danemark, en Pologne et en Serbie.Avant de prendre les rênes de Frisbii, Grégory Herbert a passé près de sept ans chez Dataiku, où il a rejoint l’équipe en 2017, alors que la pépite française ne comptait qu’une soixantaine d’employés. Il y a contribué à la montée en puissance spectaculaire de l’entreprise, devenue un acteur mondial majeur de la data science et de l’IA, jusqu’à occuper le poste de SVP et General Manager Europe. Une trajectoire qui s’appuie sur une expertise forgée plus tôt chez LexisNexis, où il participait déjà à l’émergence de l’IA appliquée au droit prédictif.Au fil de ces années, il a été témoin de l’évolution rapide — et parfois chaotique — de l’adoption de l’intelligence artificielle dans les entreprises. De la frénésie des preuves de concept sans retour sur investissement, à l’explosion des modèles génératifs, il plaide aujourd’hui pour une approche pragmatique et frugale, centrée sur la small data et sur des cas d’usage ciblés. 
  • 29. Les bienfaits d'une machine inutile

    34:43||Saison 3, Ep. 29
    Olivier Mével découvre le web au début des années 1990 lors d’une coopération à New York, aux débuts de l’Internet grand public. À son retour en France, il cofonde l’une des premières agences de création de sites, avant de s’engager dans une aventure qui marquera l’histoire des objets connectés. En 2005, avec Rafi Haladjian, ils lancent l'étonnant Nabaztag, lapin Wi-Fi considéré comme le premier objet connecté au monde, vendu à 200 000 exemplaires.Pionnier de l’IoT, Olivier Mével multiplie ensuite les projets — parfois très ludiques, parfois plus industriels — et fonde un bureau d’études travaillant pour EDF, AXA ou La Poste. En 2022, il change de trajectoire et crée Multiplié, une « maison d’édition d’objets » technologiques et poétiques. Son premier produit, la machine, réinvention d’un gadget imaginé en 1952 par Marvin Minsky, refuse obstinément de fonctionner lorsqu’on appuie sur son interrupteur : un bras surgit pour l’éteindre immédiatement.Objet inutile, mais volontairement joyeux, la machine redonne du charme à une technologie devenue anxiogène. Fabriquée en France, précommandée à plus de 2 000 exemplaires, elle revendique un autre rapport au numérique — plus physique, plus libre. Une tech alternative, ludique et créative, héritière des pionniers qui ont façonné l’informatique contemporaine.
  • 28. La vision augmentée du combattant

    34:56||Saison 3, Ep. 28
    Ingénieure en optique formée à SupOptique, Claire Valentin construit depuis vingt ans un parcours autour des technologies les plus sensibles : photonique, optronique, imagerie, détection nucléaire. Avant de devenir directrice de la stratégie d’Exosens, leader mondial des technologies d'amplification, de détection et d'imagerie, elle a passé dix ans à la Délégation générale pour l’armement, finançant des projets de R&D pour l'armée française. Suivront des postes chez Alcatel, en plein boom des télécoms optiques, puis chez Thales dans l’imagerie rayon X, chez Essilor dans les verres ophtalmiques et chez Sofradir (devenu Lynred), spécialiste des détecteurs infrarouges.Elle rejoint Exosens il y a quatre ans, alors que l’entreprise entame une transformation majeure : sortie d’une tentative de rachat par l’américain Teledyne, reprise par le fonds européen HLD, diversification vers les marchés civils et offensive mondiale. L’entreprise est devenue l’un des trois acteurs stratégiques capables de concevoir des tubes intensificateurs d’image pour la vision nocturne — technologie critique utilisée par les forces armées, notamment depuis la guerre en Ukraine qui a replacé le combat d’infanterie au centre des doctrines militaires.Exosens renforce aussi ses positions dans la détection nucléaire — capteurs de neutrons et de gammas pour réacteurs et futurs SMR — et dans l’imagerie scientifique, tout en portant un effort massif de R&D : plus de 60 % du chiffre d’affaires provient de produits lancés depuis 2016.
  • 27. L'orfèvre en cybersécurité

    42:00||Saison 3, Ep. 27
    Depuis trente-cinq ans, Michel Van Den Berghe avance sur le front de la cybersécurité. Passé par les géants américains IBM et Computer Associates, il fonde en 2002 sa propre société dédiée à la gestion des identités et introduit en France le concept de « hacking éthique ». En 2014, il cède son entreprise à Orange, qui en fera le noyau d’Orange Cyberdéfense, aujourd’hui leader européen du secteur.En 2020, à la demande de l’exécutif, il imagine un « Beer Sheva à la française » sur le modèle du pôle d'excellence en Israël : installé à la Défense, le Campus Cyber, réunit sur 26 000 m² plus de 120 entreprises publiques et privées. Un lieu unique, conçu comme une ruche d’expertise et d’échanges entre industriels, start-up et institutions, pour élever le niveau de protection national.Parti en 2024, il consacre désormais son énergie à Seclab, une deeptech née chez EDF. La société a mis au point un dispositif électronique capable d’isoler totalement les réseaux critiques sans recourir à une ligne de code : une sorte d’« air gap » électronique qui protège centrales nucléaires, usines ou hôpitaux contre les intrusions.Convaincu que la cybersécurité ne doit plus reposer sur la vigilance humaine mais sur des systèmes infaillibles, Michel Van Den Berghe résume d'une phrase son approche : « Se protéger malgré soi ».
  • 26. L'art de penser avec les machines

    34:19||Saison 3, Ep. 26
    Cofondatrice et présidente d’Ask Mona, Marion Carré explore depuis près de dix ans la frontière entre intelligence artificielle et créativité. Diplômée en humanités numériques, elle crée en 2016 cette start-up pionnière qui conçoit des dispositifs d’IA « au service de la curiosité » pour les musées, le tourisme ou l’éducation. Son entreprise a déjà collaboré avec plus de 200 institutions dans 14 pays — du Château de Versailles, dont les statues conversent grâce à l’IA, à La Poste, pour le premier timbre parlant.Mais elle ne se limite pas à la technologie : elle la questionne. Autrice du livre Le paradoxe du tapis roulant (JC Lattès), elle y met en garde contre le risque d’un usage paresseux des outils génératifs qui nous uniformisent. « Si on délègue trop à la machine, on finit par tous raconter la même histoire », résume-t-elle. Enseignante à Sciences Po, elle invite à inverser la logique : transformer le « tapis roulant » qui nous endort en « tapis de course » intellectuel, pour utiliser l’IA comme un outil de réflexion et non de remplacement.Par ses travaux elle popularise les notions de « paresse algorithmique » ou d’« IA conviviale », inspirée d’Ivan Illich : des intelligences artificielles transparentes, éducatives et dialogiques, capables de stimuler plutôt que de substituer l’esprit humain.
  • 25. Le stratège de l'ambition spatiale européenne

    38:30||Saison 3, Ep. 25
    Ingénieur de formation, d’origine allemande, Hermann Ludwig Moeller dirige depuis 2022 le European Space Policy Institute (ESPI), le think tank stratégique installé à Vienne qui éclaire les choix de l’Europe dans le domaine spatial. Après un parcours à l’Agence spatiale européenne (ESA), où il a contribué à la conception de grands programmes comme Copernicus, référence mondiale en observation de la Terre, il a progressivement déplacé son regard du technique vers le politique. À la tête de l’ESPI, il s'efforce de « faire parler entre eux » les multiples acteurs d’un écosystème éclaté — Commission européenne, ESA, agences nationales et industriels — afin de renforcer une souveraineté spatiale européenne encore fragile face aux États-Unis et à la Chine.Observateur des bouleversements récents — retour du spatial dans le champ régalien depuis la guerre en Ukraine, montée du New Space, essor du privé —, il plaide pour une Europe indépendante et ambitieuse au plan industriel : « Il faut trouver l’équilibre entre l’énergie des entrepreneurs et la responsabilité des États ». Pour lui, l'espace constitue l’espace la prochaine grande rupture technologique, comparable à celle d’Internet dans les années 1990, et l'Europe est encore capable d'un tenir un rôle décisif.
  • 24. Le laser français qui défie Starlink

    38:55||Saison 3, Ep. 24
    Normalien, docteur en physique quantique entre la France et l’Australie, Jean-François Morizur fonde Cailabs à Rennes, en 2013, après un détour par le Boston Consulting Group. Son idée : exploiter une technologie de mise en forme de la lumière pour multiplier les capacités de transmission des fibres optiques. Dix ans plus tard, la même innovation propulse Cailabs dans une autre dimension.La PME bretonne s’est imposée comme un acteur mondial du New Space, grâce à sa technologie capable de stabiliser les faisceaux laser perturbés par l’atmosphère. Un savoir-faire devenu stratégique à l’heure où les communications par laser entre satellites et stations au sol explosent, plus rapides, plus sécurisées et plus difficiles à intercepter que les ondes radio.Cailabs, qui emploie plus de 150 personnes, collabore désormais avec les grandes agences spatiales et les armées occidentales. À 39 ans, ce passionné de science-fiction — lecteur assidu d’Iain M. Banks — voit dans la maîtrise de la lumière non pas un simple défi scientifique, mais une promesse d’indépendance technologique.
  • 23. L'investisseur humaniste

    35:54||Saison 3, Ep. 23
    Cofondateur en 2016 du fonds Daphni, Pierre-Eric Leibovici veut réinventer un métier trop longtemps corseté par des logiques bancaires. Ingénieur de formation, passé par BNP Paribas et le fonds d'investissement Partech, il revendique une approche entrepreneuriale du capital-risque : prise de risque assumée, transparence avec les investisseurs et conviction que la tech européenne doit miser sur ses propres forces plutôt que de copier la Silicon Valley.Daphni s’est imposé comme une société de gestion bâtie comme une start-up, avec ses ingénieurs, sa plateforme numérique et même un directeur technique. Objectif : dénicher plus vite les pépites grâce à la data et à l’IA. Son logiciel interne épluche chaque année plus de 80 000 dossiers pour déceler les plus prometteurs. Mais Pierre-Eric Leibovici reste convaincu que le facteur humain fait la différence. Investisseur historique de Back Market, un des leaders du reconditionnement électronique, il revendique une ligne claire : investir dans des innovations à impact, à la croisée du “Tech for Good” et du “Build a City for Good”. Chez lui, pas de culte de la licorne, mais la conviction qu’un modèle européen durable peut rivaliser avec les mastodontes américains.
  • DeepTechs LIVE (2) avec Michael Jordan

    30:50|
    Pour la première fois, DeepTechs s'est produit en public, pour deux épisodes. C'était le 25 septembre dernier à l'occasion du Sommet du Bien Commun, organisé par Challenges et la Paris School of Economics, à la Maison de l'Océan, à Paris. Dans ce deuxième volet, Michael Jordan, professeur à Berkeley et chercheur à l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique livre ses pistes pour rapprocher économie et intelligence artificielle.Chercheur américain en intelligence artificielle, apprentissage automatique et statistiques, Michael I. Jordan jouit d’une notoriété internationale ; en 2016 ; la prestigieuse revue Science l’a qualifié « d’informaticien le plus influent au monde ». Très attaché à l’Europe – il parle français et italien – il a été accueilli pendant un an à l'Inria en 2013 pour une année sabbatique. Il en dirige, pour cinq ans, la chaire "Marchés et apprentissage"