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Choses à Savoir - Culture générale
Qu’est-ce que la loi du mort-kilomètre ?
La loi du mort-kilomètre est une expression qui désigne un phénomène médiatique et psychologique : plus un événement tragique se déroule près de nous, plus il nous touche émotionnellement et attire l’attention des médias. À l’inverse, un drame identique survenant à des milliers de kilomètres suscitera beaucoup moins d’émotion et de couverture médiatique, même s’il est bien plus meurtrier.
Origine et principe
Le mot "kilomètre" met en évidence la dimension géographique de cette règle implicite, utilisée notamment dans le journalisme. L’idée sous-jacente est que "la mort d’une personne proche géographiquement et culturellement vaut médiatiquement plus que celle de centaines d’étrangers lointains". Ce phénomène repose sur plusieurs facteurs :
1. La proximité géographique : Un accident ou une catastrophe ayant lieu dans notre ville ou pays nous paraît toujours plus marquant qu’un drame similaire à l’étranger.
2. La proximité culturelle et sociale : Nous nous identifions plus facilement aux victimes qui partagent notre langue, nos habitudes ou notre mode de vie.
3. L’effet médiatique et économique : Les médias privilégient souvent les événements locaux ou nationaux, car ils génèrent plus d’audience et d’émotions chez les spectateurs.
Exemples concrets
Un attentat qui fait 5 morts en Europe peut faire la une des journaux pendant plusieurs jours, tandis qu’un attentat causant des centaines de victimes en Asie ou en Afrique est souvent relayé de manière plus brève.
Une catastrophe naturelle en France, comme une tempête ou une inondation, déclenche une mobilisation intense, alors que des typhons meurtriers en Asie peuvent être à peine mentionnés.
Une perception biaisée du monde
Ce phénomène a des conséquences importantes :
Il fausse notre perception des risques : On peut croire que certains événements sont plus fréquents qu’ils ne le sont réellement, simplement parce qu’ils sont plus médiatisés.
Il influence les politiques publiques et l’aide internationale : Certains drames attirent plus d’attention et de fonds humanitaires que d’autres, non pas en raison de leur gravité, mais de leur visibilité médiatique.
Approfondir le sujet avec des études et ouvrages
Ce concept a été exploré par plusieurs chercheurs et journalistes :
1. "Manuel de journalisme : Écrire pour le journal" – Yves Agnès : il explique comment la proximité géographique et émotionnelle influence la hiérarchisation des nouvelles dans les médias.
2. "Le fait divers" – Annick Dubied et Marc Lits : ils analysent le rôle du fait divers dans la société et la manière dont la proximité affecte la couverture des événements.
3. "La loi du mort-kilomètre n'est pas automatique" – La Revue des Médias (INA) : cet article nuance le concept en montrant que d’autres facteurs (intérêt stratégique, actualité dominante) influencent aussi la couverture médiatique
4. "La proximité dans les médias : retour sur une 'loi'" – Jean-Marie Charon : il analyse comment la proximité influence la sélection et le traitement de l'information
Conclusion
La loi du mort-kilomètre est un biais naturel mais amplifié par les médias, qui accordent plus d’importance aux tragédies proches. Cette inégalité de traitement pose la question de la responsabilité des journalistes et de notre propre perception du monde.
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Pourquoi des milliers de Péruviennes ont-elles été stérilisées de force ?
02:20|Entre 1996 et 2000, le Pérou a vécu l’un des épisodes les plus sombres et les plus méconnus de son histoire récente : des milliers de femmes, en grande majorité pauvres, indigènes et rurales, ont été stérilisées de force, dans le cadre d’un programme gouvernemental présenté comme… une politique de santé publique.À cette époque, le président Alberto Fujimori dirige le pays d’une main de fer. Officiellement, son gouvernement lance une vaste campagne de "planification familiale" pour réduire la pauvreté. L’idée semble simple : moins d’enfants, donc moins de misère.Mais derrière les slogans, une réalité bien plus brutale se met en place.Dans les villages reculés, souvent quechua ou aymara, des femmes sont convoquées dans des centres de santé. On leur promet une consultation gratuite, un vaccin, une aide financière… mais une fois sur place, elles sont emmenées en salle d’opération. Sans explication. Sans consentement. Parfois même sous la menace.On leur ligature les trompes. C’est irréversible.Au total, plus de 300 000 femmes ont été stérilisées. Certaines ont été attachées. D’autres anesthésiées à moitié. Des témoignages évoquent des douleurs atroces, des infections, et même des décès. Il y a eu aussi des cas d’hommes stérilisés de force, mais en bien plus petit nombre.Ce programme n’avait rien d’un choix éclairé : c’était une campagne de contrôle démographique ciblé, avec des quotas imposés aux médecins. Ceux qui ne "produisaient" pas assez de stérilisations étaient sanctionnés. Un véritable système, bureaucratisé, cynique.Pourquoi ces femmes ? Parce qu’elles étaient pauvres. Parce qu’elles parlaient peu ou pas l’espagnol. Parce qu’elles avaient peu de moyens pour se défendre, et que leurs voix avaient peu de poids dans les instances politiques.Pendant des années, ce scandale a été ignoré, minimisé, étouffé.Mais les témoignages ont fini par remonter. Des associations de femmes, des journalistes, des ONG ont documenté les faits, rassemblé des preuves, et porté plainte.Aujourd’hui encore, les victimes attendent réparation. Le procès contre Fujimori a été ouvert en 2021, mais traîne. Pour beaucoup, cette affaire n’est pas seulement une question de justice, mais de mémoire collective : rappeler que derrière les statistiques, il y avait des vies. Des mères. Des jeunes femmes. Et que tout cela s’est produit au nom de la lutte contre la pauvreté.Pourquoi dit-on une “canicule” quand il fait très chaud ?
01:41|Le mot « canicule » désigne aujourd’hui une période de chaleur intense, mais il tire son origine d’une référence astronomique et mythologique surprenante. Ce terme vient du latin canicula, qui signifie « petite chienne », et fait directement allusion à l’étoile Sirius, l’une des plus brillantes du ciel.Une origine célesteSirius se trouve dans la constellation du Grand Chien (Canis Major), et les Romains l'appelaient Canicula – la petite chienne. Or, dans l’Antiquité, l’apparition de Sirius à l’aube, vers la fin juillet, coïncidait avec les jours les plus chauds de l’année dans l’hémisphère nord. Les Grecs et les Romains pensaient alors que la lumière de cette étoile, combinée à celle du Soleil, augmentait la chaleur terrestre.C’est pourquoi on a commencé à appeler cette période estivale les « jours de la canicule », généralement situés entre le 22 juillet et le 23 août. Ce lien entre chaleur extrême et Sirius est resté dans la langue… même si l’on sait aujourd’hui que la température de l’air n’a aucun lien physique avec les étoiles !Du ciel au langage courantAu fil des siècles, le terme a évolué. Il ne désigne plus uniquement la période astronomique liée à Sirius, mais toute vague de chaleur exceptionnelle et prolongée, souvent accompagnée de nuits où la température ne redescend pas suffisamment. En météorologie moderne, on parle de canicule lorsque les températures maximales et minimales dépassent des seuils définis pendant au moins trois jours consécutifs, seuils qui varient selon les régions.Par exemple, en France, une canicule est officiellement déclarée lorsqu’il fait plus de 35 °C le jour et plus de 20 °C la nuit, de manière durable, dans certaines zones.Une notion devenue sensibleDepuis les canicules marquantes, comme celle de 2003 en France, qui a causé près de 15 000 décès, le mot « canicule » évoque désormais aussi un enjeu de santé publique, avec des plans d’alerte, des vigilances météo et des campagnes de prévention.En résuméOn parle de canicule quand il fait très chaud, en référence à l’étoile Sirius, la « petite chienne », dont l’apparition en été était autrefois associée aux grandes chaleurs. Le mot, venu du ciel, est resté… et s’est transformé en terme climatique et sanitaire, synonyme de vigilance face aux extrêmes de plus en plus fréquents.Pourquoi Jean-Paul Sartre était-il obsédé par les crustacés ?
02:37|Aussi étrange que cela puisse paraître, oui, Jean-Paul Sartre a bien connu une obsession pour les crustacés, et plus précisément pour les homards. Mais il ne s’agit pas là d’un goût culinaire ou d’une fascination philosophique : cette obsession trouve son origine dans une expérience hallucinogène, vécue par le philosophe dans les années 1930.À cette époque, Sartre s'intéresse de près aux états modifiés de conscience. Dans un cadre semi-expérimental, il accepte de consommer de la mescaline, un puissant psychotrope extrait de cactus comme le peyotl, utilisé traditionnellement par certaines tribus amérindiennes. La substance est connue pour provoquer des hallucinations visuelles et des distorsions sensorielles intenses.Peu de temps après cette expérience, Sartre est victime d’hallucinations récurrentes. Il voit apparaître, autour de lui, des homards qui le suivent dans la rue, l’attendent dans les couloirs, surgissent dans son champ de vision. Il en parlera comme de "crabes", ou de "grosses bêtes aux pinces", qui deviennent une présence quasi constante, parfois intrusive, parfois presque familière.Loin de disparaître avec le temps, ces visions persistent plusieurs semaines après la prise de mescaline. Sartre, alors âgé d’environ 30 ans, s’en amuse parfois, mais en garde une certaine inquiétude. Il confiera plus tard à Simone de Beauvoir, puis à des journalistes, que ces créatures semblaient l’accompagner dans ses déplacements — une sorte de délire visuel lucide, dont il avait conscience, mais qu’il ne pouvait totalement maîtriser.Dans une interview donnée à John Gerassi dans les années 1970, Sartre expliquera avec humour :"J’ai vu des homards pendant longtemps. Ils m'accompagnaient partout. Je savais bien qu’ils n’étaient pas réels… mais ils étaient là."Cette anecdote étrange n’a rien d’un délire permanent ou pathologique. Elle montre plutôt la curiosité de Sartre pour les frontières de la perception, la nature de la conscience, et la subjectivité. Des thèmes qu’il explorera d’ailleurs dans La Nausée ou L’Imaginaire, où le trouble de la réalité occupe une place centrale.Aujourd’hui, cet épisode est devenu presque légendaire. Il illustre le côté expérimental et audacieux de Sartre, qui n’hésita pas à mettre son esprit à l’épreuve pour mieux comprendre ce qu’il appelait "l’existence pure".Alors oui, Sartre fut bien escorté par des crustacés… du moins dans sa tête.--------------------Vous cherchez des récits inspirants de course à pied ? Avec Course Epique découvrez les plus belles histoires de coureurs, amateurs comme élites, qui vous encouragent à débuter, continuer ou exceller. Ecouter Course Epique sur :Apple Podcasts : https://podcasts.apple.com/fr/podcast/course-epique/id1510967100Spotify : https://courseepique.fr/wp-content/uploads/2021/02/Spotify.pngDeezer : https://www.deezer.com/fr/show/1174282ou encore : https://shows.acast.com/course-epiqueYouTube : https://www.youtube.com/@CourseEpiqueQuel est le point commun entre une bière et un vagin ?
02:16|À première vue, difficile d’imaginer deux choses plus différentes que la bière et le vagin. L’un est une boisson conviviale, l’autre un organe intime, essentiel à la reproduction. Et pourtant, un fait scientifique inattendu les relie : leur acidité naturelle. Plus précisément, le pH de la bière est très proche de celui du vagin. Un détail curieux… mais tout à fait exact.Le pH, ou potentiel hydrogène, mesure l’acidité ou l’alcalinité d’une substance sur une échelle de 0 à 14. Un pH de 7 est neutre (comme l’eau pure), tandis qu’un pH inférieur à 7 est acide, et supérieur à 7, basique. Plus on s’éloigne de 7, plus l’acidité ou la basicité est marquée.Commençons par la bière : son pH moyen varie entre 4,0 et 4,5. Ce niveau d’acidité est en grande partie dû au malt et surtout aux houblons utilisés pendant la fabrication. Ces composants végétaux apportent non seulement de l’amertume mais aussi des acides qui empêchent le développement de bactéries indésirables. Ce pH modérément acide contribue également à la fraîcheur et à la stabilité de la boisson.Du côté du corps humain, le vagin a naturellement un pH situé entre 3,8 et 4,5. Ce milieu acide est principalement dû à la présence de lactobacilles, des bactéries bénéfiques qui transforment le glycogène (sucre produit par les cellules vaginales) en acide lactique. Cette acidité est essentielle : elle forme une barrière naturelle contre les infections, en empêchant le développement de bactéries pathogènes, de levures et d’autres micro-organismes.Ce point commun – un pH acide proche – est donc le fruit de mécanismes très différents, mais aux effets similaires : la protection. Dans les deux cas, l’acidité empêche la prolifération d’agents indésirables, qu’ils soient bactériens dans le cas de la bière, ou pathogènes dans celui du vagin. Un environnement trop basique dans l’un ou l’autre cas serait synonyme de déséquilibre, voire de contamination.Faut-il pour autant tirer des conclusions pratiques ? Pas vraiment. Ce parallèle est surtout une curiosité biologique et chimique. Il illustre comment des environnements très éloignés peuvent, par nécessité de défense, évoluer vers des conditions similaires. Cela dit, il n’est pas recommandé de comparer les deux au-delà de leur pH.En résumé, la bière et le vagin partagent un pH acide, entre 3,8 et 4,5, un chiffre discret mais crucial pour leur bon fonctionnement. Une coïncidence insolite, qui montre encore une fois que la chimie est partout, jusque dans les endroits les plus inattendus.Qu’est-ce que le mythe du gland de lait ?
02:28|Le "mythe du gland de lait" est une expression peu connue du grand public, mais riche de significations, qui remonte à l'Antiquité. Il s'agit d’une image métaphorique désignant une croyance répandue chez certains peuples anciens selon laquelle les premiers humains — ou les premiers âges de l’humanité — vivaient dans un état d’abondance naturelle, où la nourriture était offerte spontanément par la nature, sans travail ni effort.Le gland (fruit du chêne) et le lait (produit nourricier par excellence) deviennent ici des symboles d’une terre nourricière, généreuse et bienveillante, dans laquelle l’humanité vivait en harmonie avec la nature, sans agriculture, sans guerre, et sans hiérarchie sociale. On retrouve cette idée dans le mythe de l’Âge d’or, largement développé par les auteurs antiques comme Hésiode, Ovide ou Lucrèce.Chez Hésiode, dans sa Théogonie puis dans Les Travaux et les Jours, l’Âge d’or est présenté comme une époque révolue où les hommes vivaient comme des dieux : ils ne vieillissaient pas, ne travaillaient pas, et trouvaient leur nourriture sans cultiver la terre. Le gland y apparaît comme une nourriture abondante tombant des arbres, évoquant une nature autosuffisante.L’expression "gland de lait" n’est pas à prendre littéralement. Elle repose sur l’association poétique de deux aliments fondamentaux : le gland, nourriture primitive disponible en forêt, et le lait, nourriture maternelle et symbolique de l’abondance. Ensemble, ils décrivent une vision idéalisée de l’état de nature : une forme de paradis terrestre antérieur à la civilisation.Au fil du temps, ce mythe est repris, revisité et transformé. Au XVIIIe siècle, Rousseau s’en inspire pour nourrir sa réflexion sur l’état de nature et la corruption liée au progrès. L’idée d’une humanité originelle, simple et heureuse, vivant dans une égalité parfaite, hante les débats philosophiques sur l’origine de la société et de l’injustice.Dans une perspective plus moderne, le "mythe du gland de lait" sert à désigner la nostalgie d’un monde perdu, d’un lien rompu entre l’homme et la nature. Il évoque aussi les illusions d’un retour facile à une forme d’abondance naturelle, sans prendre en compte les contraintes écologiques ou les réalités sociales.En résumé, le mythe du gland de lait est une image poétique et politique, née de l’Antiquité, qui célèbre un âge d’or idéalisé où l’homme vivait sans effort, nourri par une nature généreuse. Il continue de nourrir les imaginaires, entre utopie pastorale et critique du monde moderne.Quelle est la différence entre le foin et la paille ?
01:59|Foin et paille : deux mots souvent confondus, deux matières végétales pourtant très différentes, tant par leur origine que par leur usage. Dans une grange ou un clapier, ces deux éléments peuvent cohabiter… mais ils n’ont ni le même rôle, ni la même valeur nutritive.Commençons par le foin. Il s’agit d’un mélange d’herbes séchées, récoltées en général au début de l’été. Ce sont principalement des graminées (comme le ray-grass ou la fléole) et des légumineuses (comme la luzerne ou le trèfle). Le foin est fauché avant que les plantes ne montent trop en graine, afin de conserver une bonne teneur en fibres, minéraux et protéines. Il est ensuite séché naturellement au soleil ou artificiellement, puis stocké à l’abri de l’humidité.Le foin est un aliment, principalement destiné aux animaux herbivores : chevaux, moutons, vaches, chèvres, et bien sûr… lapins. Il constitue pour eux une base essentielle de leur alimentation. Non seulement il les nourrit, mais il favorise aussi l’usure naturelle des dents chez les rongeurs et assure un bon transit intestinal. Plus le foin est vert et odorant, plus il est riche et de bonne qualité.La paille, elle, vient d’un tout autre processus. Il s’agit du résidu végétal issu de la culture de céréales comme le blé, l’orge ou l’avoine. Une fois les grains récoltés, on ne garde que les tiges sèches et creuses : c’est cela, la paille. Elle est beaucoup plus pauvre sur le plan nutritionnel. On dit même qu’elle est quasiment inerte sur le plan alimentaire. Elle n’est donc pas donnée à manger, sauf en cas de pénurie, et encore, de façon très limitée.En revanche, la paille est idéale comme litière. Elle est sèche, absorbante, confortable et isolante. Les animaux s’y couchent, s’y blottissent, y font leurs besoins. C’est ce qu’on retrouve dans les étables, les clapiers ou les poulaillers. Sa texture creuse et cassante n’est pas agréable à mâcher : un bon point, car cela évite que les animaux ne la mangent.En résumé, le foin est à la fois nourrissant et essentiel à la santé digestive des herbivores, tandis que la paille est un matériau de couchage, utile pour le confort et l’hygiène. Visuellement, on les distingue aussi : le foin est souvent plus vert, souple et odorant, la paille est jaune, rigide et sèche.Alors, si vous avez un lapin : le foin, c’est dans la gamelle. La paille, c’est dans la litière.Quel est le mystère de l’horloge du Panthéon ?
02:18|Paris, octobre 2006. Au cœur du Panthéon, ce temple solennel dédié aux grandes figures de la République, un événement étrange se produit : l’horloge monumentale, figée depuis des années, se remet à fonctionner. Aucun chantier n’a été annoncé. Aucun artisan n’a été mandaté. Et pourtant, les aiguilles tournent de nouveau. Comme par magie.La surprise laisse place à l’incrédulité. Le Centre des monuments nationaux n’a rien commandé. Aucune équipe de restauration n’est intervenue. Qui a réveillé l’antique mécanisme ?L’affaire reste un mystère… jusqu’à ce qu’un nom émerge : les Untergunther. Un groupe d’activistes discrets, passionnés par le patrimoine oublié. Ce sont eux, apprend-on fin 2006, qui ont mené dans le plus grand secret, entre septembre 2005 et septembre 2006, la restauration complète de l’horloge. Le tout, sans autorisation. Sans alerter personne.Tout commence un soir de 2005. Les Untergunther pénètrent discrètement dans les hauteurs du Panthéon. Là, ils découvrent un espace condamné, poussiéreux, abritant l’horloge Wagner, installée en 1850. Le chef-d’œuvre est à l’abandon, oxydé, muet. Mais ses entrailles mécaniques peuvent encore revivre. Le groupe décide alors l’impensable : restaurer l’horloge clandestinement.Avec l’aide de Jean-Baptiste Viot, horloger professionnel, ils aménagent un campement dans les combles du monument. Pendant un an, ils y vivent en cachette, accédant au mécanisme la nuit, travaillant à la lampe torche. Pour dissimuler leur passage, ils vont jusqu’à installer une fausse bibliothèque qui masque une porte dérobée.En septembre 2006, le mécanisme est prêt. L’horloge recommence à battre. Et personne ne comprend comment. Quand le secret est éventé, l’administration panique. Le Centre des monuments nationaux porte plainte pour intrusion. Mais le procès, qui se tient en 2007, tourne court : les Untergunther sont relaxés, le juge estimant qu’aucun préjudice n’a été causé, bien au contraire. Ils ont, au fond, sauvé un morceau d’histoire oublié de tous.Depuis, cette aventure est devenue culte. Elle soulève des questions sur l’abandon du patrimoine, sur la légitimité des actions non autorisées mais bénéfiques, et sur le pouvoir de la passion. L’horloge du Panthéon, réveillée en 2006 par des mains invisibles, ne donne pas seulement l’heure : elle raconte une rébellion douce, poétique, contre l’oubli. Et rappelle qu’il suffit parfois de quelques passionnés… pour remettre en marche le temps.Pourquoi les arrondissements de Paris forment-ils un escargot ?
02:37|Quand on observe le plan de Paris, la succession des vingt arrondissements trace une spirale compacte, si parfaite qu’on la surnomme « l’escargot ». Contrairement à la légende, cet enroulement n’a rien d’esthétique : il résulte de deux opérations de découpage que la capitale a connues, d’abord sous la Révolution française, puis sous Napoléon III, chacune répondant à des impératifs très prosaïques.Le 11 octobre 1795, la Convention thermidorienne supprime les anciennes paroisses héritées de l’Ancien Régime et répartit Paris en douze arrondissements. Le principe retenu est celui d’une lecture « en zigzag » : on commence au Palais-Royal, on longe la Seine vers l’ouest, puis on remonte vers le nord jusqu’aux Buttes-Montmartre, avant de redescendre vers l’est. Ce système, calqué sur la façon dont on tourne les pages d’un livre, suffisait tant que la ville restait contenue à l’intérieur du mur des Fermiers généraux.Or, à partir de 1852, Napoléon III engage le préfet Haussmann dans un vaste projet d’embellissement. Pour aérer la ville, il faut annexer les faubourgs qui se sont densifiés de l’autre côté des fortifications de Thiers. Le décret du 1ᵉʳ janvier 1860 agrandit Paris et absorbe onze communes voisines : Passy, Auteuil, Belleville, La Villette, entre autres. En conséquence, la capitale passe de douze à vingt arrondissements ; il devient impossible de garder la vieille numérotation sans bouleverser des milliers d’adresses déjà gravées dans la pierre.Haussmann se met donc en quête d’un schéma qui limite les changements. Avec l’ingénieur Alphand, il décide de prendre le Louvre comme point de départ, symbole central du pouvoir, puis d’attribuer les numéros en tournant dans le sens des aiguilles d’une montre : on balaye la rive droite jusqu’à la barrière d’Ivry, on traverse la Seine au Jardin des Plantes, et l’on achève la boucle sur la rive gauche pour revenir vers Passy. Ce mouvement continu forme une spirale, maintient presque intacte la numérotation du centre et immortalise, par le simple dessin d’une coquille, les priorités sociales et la hiérarchie spatiale voulues par le Second Empire.Rapidement, Charivari et Le Monde illustré repèrent cette forme et la baptisent « l’escargot parisien ». Le surnom reste : il suffit de suivre la coquille pour se repérer, du Louvre (1ᵉʳ) à Belleville (20ᵉ). La logique est si ancrée qu’en 2020, lors des débats sur la fusion administrative des quatre premiers arrondissements, la Ville a préservé la numérotation historique pour ne pas briser la spirale. Ainsi, si les arrondissements de Paris forment un escargot, c’est parce que la capitale a cherché, en 1860, le compromis le plus efficace : économiser les plaques, ménager les riches, intégrer de nouveaux quartiers et offrir au promeneur l’un des plans urbains les plus reconnaissables du monde.Pourquoi dit-on un café “mocha” ?
02:27|Le café "mocha" – ou "moka" en français – n’est pas seulement une boisson aromatisée au chocolat. C’est avant tout un nom chargé d’histoire, qui puise ses origines dans le commerce maritime et les débuts de la mondialisation du café. Ce nom fait directement référence à la ville portuaire de Mokha, située sur les côtes du Yémen, au bord de la mer Rouge.Entre le XVIe et le XVIIIe siècle, Mokha fut le principal port d’exportation du café au monde. C’est depuis ce comptoir que les Européens ont découvert le café, et ce bien avant que les premières plantations ne soient créées ailleurs. À cette époque, les grains étaient cultivés exclusivement sur les plateaux du Yémen, notamment autour de la ville de Sana'a. Les grains récoltés étaient ensuite transportés à dos de mulets ou de chameaux jusqu’au port de Mokha, d’où ils prenaient la mer pour rejoindre les grandes villes d’Europe et d’Asie.Le café exporté par Mokha avait une saveur particulièrement réputée : corsée, intense, légèrement cacaotée. Ce profil aromatique unique, dû à l’altitude et au climat des hauts plateaux yéménites, allait marquer les palais européens. Très vite, le nom "mocha" devint synonyme de café de qualité, et par extension, de café tout court dans certaines régions.Au fil des siècles, la ville de Mokha perdit de son importance. À partir du XIXe siècle, de nouvelles plantations virent le jour ailleurs, notamment à Ceylan (l’actuel Sri Lanka), en Indonésie, puis en Amérique latine. Les Hollandais, puis les Britanniques, développèrent ces cultures coloniales qui finirent par supplanter le quasi-monopole yéménite. Le port de Mokha déclina peu à peu, concurrencé par Aden et d’autres hubs maritimes plus modernes.Malgré cela, le nom "mocha" resta dans les mémoires et s’ancrera durablement dans le langage du café. Lorsque, plus tard, les Italiens ou les Américains commenceront à mélanger du café espresso avec du chocolat fondu et du lait, cette boisson prendra naturellement le nom de "mocha" — en hommage à l’arôme chocolaté du café original venu du Yémen.Aujourd’hui, dans les coffee shops, le terme "mocha" désigne surtout une recette gourmande, à base de café, de chocolat et de lait. Mais son nom raconte une histoire bien plus ancienne, celle des premiers grains exportés sur les voiliers arabes, du goût inimitable du café yéménite… et d’un petit port oublié qui a donné son nom à une boisson mondialement célèbre.