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Entre Nos Lignes

Titiou Lecoq, Les Grandes Oubliées

Saison 3, Ep. 32

J'ai grandi avec l'idée que les femmes avaient dû s'émanciper, gagner leurs droits crescendo, qu'elles étaient longtemps coincées au foyer dans un rôle de mère et qu'elles s'en étaient progressivement libérées pour demander l'égalité. Je pouvais citer bien peu de figures féminines historiques sans que ça m'interroge, puisque je n'en ai pris conscience que tardivement.

Avec les Grandes Oubliées, Titiou Lecoq m'a retournée le cerveau de façon fabuleuse et puissante (cela dit c'est récurrent avec elle, pour ce type de sensation il faut aussi lire Libérées). Cet essai foisonnant mais accessible s'appuie sur un travail colossal de recherches sérieuses, étayées et passionnantes (surtout sous la plume vivante, mordante et drôle de Titiou Lecoq-oui je l'aime) et nous prouve que l'histoire des femmes ne suit pas cette ligne droite de l'asservissement à la libération, qu'elles étaient là, qu'elles aussi faisaient l'histoire et qu'on a choisi de les effacer.

Une lecture essentielle pour désapprendre, réapprendre bref pour dépoussiérer les manuels d'histoire.

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  • 51. Nadia Daam, La gosse

    02:53
    Moi qui ai un projet sur les relations mère-fille, j'ai dévoré (et adoré) le livre de Nadia Daam.C'est une belle (et franchement drôle) déclaration d'amour à sa fille.C'est l'histoire d'une mère qui invite sa fille à trouver et occuper sa place. La sienne, librement. Même si parfois c'est douloureux pour elle. Et je crois qu'il n'y a pas plus beau message/cadeau à faire à son enfant qui devient adulte. C'est surtout l'histoire de deux femmes qui grandissent ensemble et prennent soin l'une de l'autre.Et, contrairement au titre, plus que sur sa "gosse" adolescente, c'est finalement sur son rôle de mère (et elle ne s'épargne pas) et sur leur relation que la journaliste s'attarde. Avec beaucoup d'humour et de tendresse, Nadia Daam parle de transmission (et élever une fille, je m'en doute déjà, met parfois son féminisme à rude épreuve), elle évoque les contradictions multiples qui sont les siennes (mais qui nous parlent à tous et toutes), l’amour bien-sûr, les peurs, les injonctions contradictoires, sa propre histoire familiale (un de mes passages préférés évoque les transfuges de classe). Et puis, elle qui a élevé sa fille quasiment seule, elle donne une voix à la famille monoparentale (si nombreuse dans les chiffres, si peu représentée dans les faits à part quand on parle des difficultés des mères célibataires). Bref, un épisode avec quelques extraits qui se lisent aussi vite que les pages se tournent et dont les mots font du bien.La Gosse est sorti chez Grasset mercredi 27 mars.
  • 50. Cécile Coulon, La langue des choses cachées

    02:51
    Le nouveau roman de Cécile Coulon se lit sans s'arrêter, c'est un conte à l'ambiance sombre et vibrante, une histoire de transmission dont les mots ensorcellent. C'est un récit d'une puissance mystérieuse qui nous happe au Fond du Puits (le lieu où se situe l'action), c'est la brutalité écrite avec poésie. C'est un voyage hors du temps dans un endroit impossible à réellement dater. C'est vibrant, surprenant, fort.La lecture du prologue a été un uppercut sublime. Ce sont des extraits de ce texte, qui dit la violence des hommes mais aussi la résistance possible, la noirceur et la lumière, que j'ai évidemment eu envie de partager dans ce 50ème épisode.Sorti en Janvier aux éditions de l'Iconoclaste.
  • 49. Violaine de Filippis-Abate, Classées sans suite

    02:05
    Le 25 Novembre c’est la journée de lutte contre les violences faites aux femmes et le 25 janvier la lutte contre le sexisme. Pour cet épisode, j’ai choisi le livre de l’avocate Violaine de Filippis-Abate, Classées sans suite. Une lecture indispensable pour comprendre pourquoi les violences faites aux femmes sont encore trop majoritairement impunies. Les parties de l’essai sur le parcours à suivre pour déposer plainte et sur les raisons systémiques de l’inégalité du système judiciaire sont passionnantes et très accessibles. Et puis, c’est aussi une lecture inspirante car des pistes d’amélioration existent et l’autrice en proposent, que ce soit sur l’éducation ou la création de juridictions spécialisées.Le combat continue ! Et bravo à cette collection chez Payot qui, après avoir parlé de la silenciation des trois premiers de grossesse et des injustices lors de la reprise du travail après un congé maternité, s’attaque à la justice.
  • 48. Patricia Houéfa Grange, Métisse et alors ?

    02:37
    La poésie peut dire la lutte tout en apaisant ses tumultes.La beauté des mots pour comprendre la violence de certains regards et de certaines histoires.Effets ressentis avec ce recueil de Patricia Houéfa Grange qui partage, dans une langue vive et sensible, son histoire personnelle de femme métisse et sa quête d'identité tout en livrant un message universel débordant d'humanité et de tolérance.Elle l'écrit "je ne veux être cousu-e que d'amour".Vive la multiplicité des racines !Et bravo à cette collection de poésie Iconopop, décidément très réussie ! #poesie #lecture #metisse #entrenoslignes
  • 47. Martine Delvaux, Pompières et Pyromanes

    02:08
    Martine Delvaux, dont j'avais adoré Le Monde est à toi, une sublime lettre écrite à sa fille récidive avec ce livre où elle s'adresse aussi à elle. Le feu embrase les fôrets et le coeur de l'autrice. Mais face à l'urgence climatique et à la colère, il n'est pour autant pas question de tout brûler mais au contraire d'aimer et d'entretenir les flammes, celle de l'espoir, de la révolte, de l'engagement, de l'amour.Des fragments autour de l'urgence qui touchent car les fragments qui composent ce livre sont aussi beaux que terrifiants. Et à lire ce chemin du feu qui mêle luttes féministes et écologie, le coeur vibre aussi d'un espoir ardent qu'on ne veut pas éteindre. Publié chez Les Avrils.
  • 46. Salomé Saqué, Sois jeune et tais-toi

    02:43
    Salomé Saqué, brillante journaliste de 27 ans, pose un regard complice sur sa génération et la jeunesse. En réponse à celleux qui les critiquent, elle montre la précarité économique et psychologique de beaucoup de jeunes et d'étudiant.e.s ou leurs inquiétudes face à la crise climatique mais aussi leurs engagements et leurs espoirs à travers une enquête sourcée et passionnante.La journaliste appelle au ralliement des ainé.e.s dans un argumentaire précis sans être accusatoire. Lire ce livre permet d'entendre ce que vivent les jeunes.D'ailleurs, ces mots ont trouvé beaucoup d'écho auprès des lycéen.ne.s avec qui j'ai récemment fait un travail d'écriture * autour du thème adolescence et espace public. Les clichés qu'ils et elles évoquaient librement sont aussi ceux qu'elle démolit, les obstacles rencontrés pour se projeter dans l'avenir et leurs envies se comprennent d'autant plus avec son analyse. Les problématiques de la jeunesse sont aussi les notres. Et, si on regrette qu'elle n'ait pas abordé certains thèmes comme le sexisme, les violences faites aux femmes ou la religion (qui semblait tenir une place centrale pour certains élèves de mon atelier), cet essai invite quand même à réfléchir aux difficultés de la jeunesse et à avancer ensemble. Pour le futur de nos enfants.Et cet extrait résonne aussi pour moi avec la violence et le mépris (des vieux actionnaires) auxquels les manifestant.e.s, majoritairement jeunes (mais pas que) ont dû faire face en essayant de bloquer pacifiquement l'assemblée générale de Total Energies la semaine dernière.pour écouter les écrits et leurs voix et en savoir plus sur ce travail d'action culturelle, rendez-vous ici : https://lilaluneetc.wixsite.com/website/au-lyc%C3%A9e-edgar-quinet
  • 45. Anne-Sophie Brasme, Mères sans filtre

    03:32
    Mères sans filtre c’est l’ouvrage initié par Camille Abbey, fondatrice des Missives, pour parler maternité et féminisme. Elle s’est entourée de sept plumes, des spécialistes du sujet comme Illana Weizman, Gabrielle Richard ou Renée Greusard en passant par des autrices qui ont consacré des romans marquants sur la question du devenir mère comme Julia Kerninon ou Anne-Sophie Brasme. Chacune y partage une réflexion, une anecdote aussi intime qu’évidemment sociétale. Camille Abbey consacre son texte à la fatigue des mères et démontre judicieusement que cet épuisement est aussi l’œuvre du patriarcat.Personnellement, le texte d’Anne-Sophie Brasme, sous forme épistolaire, m’a beaucoup touchée et les extraits de cet épisode 45 permettent de découvrir les mots puissants qu’elle adresse à la jeune accouchée qu’elle était il y a 10 ans. Pour prolonger les reflexions sur le sujet de la naissance, de la maternité et du féminisme, il y a aussi ce formidable film disponible actuellement sur Arte : Sages-Femmes de Léa Fehner ! Il met en avant le métier de sage-femme avec puissance et émotion (et invite aussi à s'engager à le défendre).
  • 44. Laurène Daycard, Nos Absentes

    04:28
    Il faut lire ce livre.J'ai eu du mal à choisir un extrait (je lis donc plusieurs passages) et encore plus de mal à écrire pour présenter l'ouvrage de Laurène Daycard tant il m'a bouleversée et captivée. C'est une lecture difficile, glaçante, et les larmes montent souvent à l'évocation de Géraldine, Seloua, Razia tuées par leur compagnon ou leur ex mais aussi en découvrant les vies brisées de leurs proches ou le témoignage de femmes rescapées.Mais c'est une enquête essentielle, sensible, intime et incroyablement fouillée sur la violence, sur la source des féminicides et sur les défaillances du système pour les empêcher.Parce que Laurène Daycard redonne vie à ces femmes hors d'une sordide rubrique de faits divers, qu'elle témoigne de celles qu'ont été mais surtout parce que, loin de se limiter à ce nécessaire travail de mémoire, l'autrice reconstitue les dossiers, assiste à certains procès et à des groupes de paroles pour des hommes condamnés par la justice pour violences conjugales. Et toutes ces recherches lui permettent de dégager des récurrences et de pointer les dysfonctionnements de la justice : la plupart des criminels étaient déjà connus pour des antécédents de violence (40 % de ces meurtres constituent un acte de récidive) et la plupart des victimes avaient portées plainte.Il faut que ça change, que l'impunité cesse, que les prises en charge évoluent.Et pour cela il ne faut pas rester dans l'ignorance.Merci Laurène Daycard pour ce travail si important. Il permet à nos absentes de rester définitivement dans nos coeurs et dans mes luttes.
  • 43. Camille Froidevaux-Metterie, Pleine et douce

    01:59
    Difficile de choisir un extrait pour ce premier roman choral de Camille Froidevaux-Metterie mais celui-ci me semble représentatif de ce que j'ai ressenti à sa lecture : la sororité comme lien entre les lignes et entre les personnages.On y croise en effet les vécus de Corinne, Lola, Lucie, Nicole, Laurence, Charline, Kenza, Colette, Manon et Jamila, toutes liées par la fille de Stéphanie, Eve (le prénom n'est clairement pas un hasard), un bébé qu'elle a fait toute seule, grâce à une PMA en Espagne. Chaque chapitre laisse la parole à l'une d'elles, qui se raconte,formant comme un cercle de femmes autour de ce nouveau bébé. Les voix se croisent, les espoirs se mêlent aux déceptions. Avec leurs préoccupations du moment (les règles, la ménopause, la sexualité, les injonctions à la beauté ou la minceur, le couple), on retrouve ainsi les thèmes de prédilection de la philosophe autrice du Corps des Femmes. C'est beau, sensible et empreint de la singularité de chaque protagoniste, même si on se reconnaît un peu dans toutes. Un vrai regard féminin.Retrouvez tous les épisodes et les évènements à venir sur le site des Missives http://www.lesmissives.fr/