Demain dès l'aube

Pour inaugurer ce podcast, j'ai choisi de vous parler de Commune Présence, un poème de René Char. Ce poème est en lui-même une définition de la poésie. Il réussit à dire "la vie inexprimable". Avec des mots durs et secs comme le sommet du mont Ventoux, à l'ombre duquel vécu le poète.Commune PrésenceTu es pressé d’écrire,Comme si tu étais en retard sur la vie.S’il en est ainsi fais cortège à tes sources.Hâte-toi.Hâte-toi de transmettreTa part de merveilleux de rébellion de bienfaisance.Effectivement tu es en retard sur la vie,La vie inexprimable,La seule en fin de compte à laquelle tu acceptes de t’unir,Celle qui t’est refusée chaque jour par les êtres et par les choses,Dont tu obtiens péniblement de-ci de-là quelques fragments décharnésAu bout de combats sans merci.Hors d’elle, tout n’est qu’agonie soumise, fin grossière.Si tu rencontres la mort durant ton labeur,Reçois-là comme la nuque en sueur trouve bon le mouchoir aride,En t’inclinant.Si tu veux rire,Offre ta soumission,Jamais tes armes.Tu as été créé pour des moments peu communs.Modifie-toi, disparais sans regretAu gré de la rigueur suave.Quartier suivant quartier la liquidation du monde se poursuitSans interruption,Sans égarement.Essaime la poussièreNul ne décèlera votre union.René Charin Commune présence, Éd. Gallimard, collection NRF Poésie© Éditions Gallimard, Paris, 1964

Demain dès l’aube est un podcast à deux voix, consacré à la poésie. Dans chaque épisode, nous vous présenterons UN poème, et UN SEUL. Ça ne durera que quelques minutes, et notre rêve, c’est qu’entre 2 meetings, 2 machines à laver ou 2 épisodes de votre série préférée, une étincelle de poésie entre dans vos vies. Si l’on a créé ce podcast, c’est parce que nous pensons tout simplement que la poésie… est indispensable à la vie ! Pourtant, la poésie, ça ne sert à rien, allez-vous nous répondre ! Et vous n’aurez pas tout à fait tort. La poésie, c’est inutile, et alors ? Dans notre monde trépidant, ça a son charme, les choses inutiles. Et puis, la poésie, ça donne du sens. Ca éclaire une journée, ça fait prendre du recul, ça permet de mieux voir la beauté du monde.C’est tout ça, donc en fait, la poésie, c’est beaucoup !A vrai dire, la poésie nous accompagne l’un comme l’autre depuis l’enfance. Au fil du temps, nous avons accumulé un “capital poétique” : des poèmes dans lesquels nous allons puiser régulièrement, pour enchanter notre quotidien.L’objectif de ce podcast est de partager avec vous ces poèmes que nous aimons, nos coups de cœur. Qu’ils soient en vers ou en prose. Qu’ils soient quatrains ou chansons. Même un petit texte peint à la va-vite sur un mur.Chaque nouvel épisode de Demain dès l’aube sera consacré à UN poème. Mais avant de vous le lire, ce poème de la semaine, nous l’éclairerons de quelques mots, nos mots à nous, à la lumière d’éléments choisis de la vie de l’auteur. Pas une biographie exhaustive à la Lagarde et Michard, rassurez-vous. Juste quelques éléments dans la vie de l’auteur qui nous ont touchés.Nous espérons que vous allez être très nombreux à nous suivre ! Pour être informés de chaque nouvel épisode, vous pouvez nous retrouver sur votre appli podcast préférée, et aussi sur notre page Facebook Podcast Demain dès l’aube.Magali Fourmaintraux et Alexandre Amiot

Rimbaud. Un monument? Un éternel adolescent? Le portrait qui est resté de lui, c’est celui de la photographie que vous connaissez toutes et tous, un portrait réalisé par le photographe Etienne Cartjat. Ce portrait aurait été pris à l’automne 1871. Il a acquis depuis un statut d’icône. Cette image, comme Rimbaud, symbolise pour toujours la poésie, la jeunesse la rébellion et le romantisme. « Au Cabaret Vert » est aussi le symbole de la poésie, de la jeunesse, de la rébellion et du romantisme. C’est un poème écrit en temps de fugue par un adolescent de 16 ans épris de liberté.Depuis huit jours, j'avais déchiré mes bottinesAux cailloux des chemins. J'entrais à Charleroi.- Au Cabaret-Vert: je demandai des tartinesDe beurre et du jambon qui fût à moitié froid.Bienheureux, j'allongeai les jambes sous la tableVerte : je contemplai les sujets très naïfsDe la tapisserie. - Et ce fut adorable,Quand la fille aux tétons énormes, aux yeux vifs,- Celle-là, ce n'est pas un baiser qui l'épeure! -Rieuse, m'apporta des tartines de beurre,Du jambon tiède dans un plat colorié,Du jambon rose et blanc parfumé d'une gousseD'ail, - et m'emplit la chope immense, avec sa mousseQue dorait un rayon de soleil arriéré.